Virginie Desmet
Ce pays encore préservé du tourisme de masse n’a rien à envier à sa voisine grecque. Ses paysages magnifiques et contrastés, sa vie bon marché et ses cités pittoresques valent qu’on dépasse les idées reçues
« L’Albanie ? Tu pars en Albanie ? Mais pourquoi ? » Et pourquoi pas, surtout ? Car, finalement, que connaît-on réellement de l’Albanie, si ce n’est son histoire récente et tourmentée ? Peu de choses.
Ce petit pays a plus d’une surprise à offrir à ceux qui sont curieux, un brin routards et qui ont soif d’authentique. C’est peut-être l’une des dernières destinations du genre aux portes de l’Europe ; portes que les Albanais ne demandent pour la plupart qu’à voir s’ouvrir.
L’Albanie est dépaysante et, pour l’heure, peu dénaturée par le tourisme. Les points informations et tour opérateurs y sont encore rares. Aussi, le mieux pour visiter le pays est soit d’être un voyageur aguerri, soit de passer par un guide.
Carrefour d’influences
A l’est, le pays est bordé par le Montenegro, le Kosovo, la Macédoine et la Grèce. Ses côtes, à l’ouest, se partagent les eaux salées des mers adriatique et ionienne. Ici, on a tout : la douceur du climat méditerranéen au sud, la fraîcheur des montagnes au nord, des plages tranquilles et des criques paradisiaques, des paysages arides ou bucoliques, mais aussi, un patrimoine et une gastronomie qui mêlent subtilement l’Orient et d’Occident (lire ci-après). Un régal pour les yeux et les papilles.
Après quatre heures de vol depuis la France et un atterrissage à Tirana, capitale du pays, direction Shkodra, une ville à l’architecture marquée par des influences italiennes. Après tout, « la botte » n’est pas si loin…
De là, deux bonnes heures de trajet sur des routes cahoteuses et escarpées, vous emmènent jusqu’au lac Koman. Un voyage durant lequel on ne croise pratiquement que des troupeaux de vaches et de chèvres. Au bord de la route, des petits bunkers à la forme ronde, sont autant de témoignages d’un temps révolu. Arrivé au lac, on peut embarquer pour des croisières. On navigue sur des eaux douces et turquoises, au milieu de montagnes qui se jettent à pic. Ici et là, on découvre une ferme isolée. Idéal pour se reposer de la route et de la marche tout en profitant de paysages fabuleux.
Voldemort et Skanderbeg
Cap ensuite sur Rrogram, perdu dans les massifs karstiques du nord surnommés les Alpes albanaises et dont la roche claire donne aux torrents une belle couleur bleu. La région est propice à la randonnée et des itinéraires y sont d’ailleurs bien balisés. On peut notamment emprunter un sentier qui monte jusqu’au pied du Mont Rosit, frontière naturelle avec le Monténégro voisin, culminant à un peu plus de 2500 mètres. Les amateurs de la saga « Harry Potter » y apprendront avec intérêt que Lord Voldemort aurait trouvé refuge sur ces hauteurs à deux reprises, lors de ses années d’exile.
Certains circuits touristiques invitent à faire un crochet par l’ancienne route menant au Kosovo et qui passe par Prizen, une cité où les liens étroits qui existent entre les deux pays sont visibles un peu partout. Cet itinéraire permet de rallier plus rapidement la ville de Krujë, épicentre de la légendaire résistance albanaise contre les Ottomans au XVe siècle. Celle-ci fut conduite par le héros national Skanderbeg, auquel le pays a emprunté les symboles pour constituer son drapeau : un aigle à deux têtes sur fond rouge.
De la cité de pierre à celle aux 1000 fenêtres
Au sud, une halte à Gjirokastër s’impose. Surnommée « la cité de pierre », elle vit naître l’écrivain national Ismail Kadare et Enver Hoxha, le père du gouvernement communiste et autoritariste qui coupa le pays du reste du monde pendant plus de quarante ans, jusqu’en 1991. C’est l’une des plus belles villes d’Albanie, classée au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2005.
En remontant, face aux rivages grecs, la côte ionienne albanaise tout à fait semblable offre de multiples plages de galets peu fréquentées sur lesquelles s’étendre et se détendre. Enfin, Berat, souvent surnommée « la ville aux mille fenêtres », est un rare exemple du style architectural typique de la période ottomane.
Tout cela permet de capter, un peu, l’esprit de ce pays, fier et attachant. Où la vie y est encore bon marché, où les terrasses des plus grandes villes comme les rues du plus petit village sont toujours animées le soir, dégageant un dynamisme que l’on sent poindre. L’Albanie, oui… Pourquoi pas ?